Zoom sur les habitants de Bozas en 1464

Les « Estimes » de 1464 sont une grande enquête fiscale faite dans la province du Languedoc pour déterminer l’assiette de l’impôt royal, la taille. L’Ardèche a la chance d’avoir conservé aux A.D. les 72 registres concernant le Vivarais. « BOSAS » y est qualifiée de « villa » , c’est-à-dire ville close derrière ses murs, l’une des 68 du Vivarais. Les opérations sont entreprises sous la direction de « noble Jehan Bastard de Joyeuse, châtelain et principal officier du lieu, probablement proche parent du seigneur le vicomte de Joyeuse. Il est assisté par les trois consuls en exercice (élus ou choisis à l’année par les habitants), précurseurs de notre municipalité moderne. Le niveau d’administration est plus élevé que la moyenne : plusieurs communautés voisines, bien que plus peuplées, n’ont pas de consul, sinon leur nombre est souvent limité à deux. Ont été désignés en plus ,comme dans les autres communautés, deux commissaires-jurés, chargés de vérifier et garantir les déclarations des habitants, notamment pour le mobilier et le cheptel.

« BOSAS » compte 34 habitants taillables, soit avec leur famille 170 personnes (les historiens admettent en général ce multiplicateur de 5). Il faut y ajouter les prêtres ou religieux, peu nombreux, les nobles, la garnison et le personnel du château. Au total, le chiffre de 200 habitants est plausible. C’est une période de creux démographique, après l’hécatombe de la Grande Peste de 1348 et les ravages des « Routiers » de la Guerre de Cent Ans qui n’ont pas épargné le Vivarais. La démographie va remonter pour culminer 4 siècles plus tard en 1851 (985 habitants), avant la chute des 150 années suivantes due à l’exode rural, et la stabilisation du 21ème siècle autour de 250 habitants, grâce à l’installation de nouveaux habitants. Sur les 34, 27 tiennent un mas ayant un nom déterminé , pour 23 d’entre eux c’est aussi leur patronyme. 7 ne déclarent pas de mas, mais une habitation à l’intérieur ou à proximité des murs de la ville ; elle est qualifiée d « hospicium »si elle se distingue par sa dimension ou peut-être certains éléments d’architecture, ou bien de « domus » ( maison) ; la valeur de ces « maisons de ville » est 2 à 4 fois supérieure à celle des maisons de la campagne.

Le patrimoine total est évalué 756 livres, soit 22 livres en moyenne par habitant . Les 2/3 sont en immeubles (terres, prés, vignes, jardins, maisons), et le1/3 en mobilier et cheptel, non détaillés contrairement à d’autres communautés. Le plus aisé est Jehan Gaurel, consul, qui exerce la profession de semellier ( artisan chausseur) ; il déclare la plus grande maison à l’intérieur des murs, évaluée 7 livres 10 sols ; il possède aussi des biens à Blachier. Son patrimoine de 100 livres lui vaut une taille à payer de 20 sols ( 1 livre). Deux autres habitants ont un patrimoine supérieur à 50 livres : Gérenton de la Prade, consul, qualifié de « laboureur » et André Perdriole, commis-juré, qui possède une petite maison à l’intérieur des murs de la ville, en plus de son mas de Perdriole ; leur taille est de 12 sols 6 deniers. Les 31 autres habitants doivent 10 sols de taille, alors que leur patrimoine va de 42 à 2 livres, ce qui est assez inégalitaire. Parmi eux, Ponchon  Foard, consul, qui possède 2 maisons à l’intérieur de la ville, mais pas de mas à l’extérieur ; et Guillaume de Sauzet, commis-juré, qui déclare son mas de Sauzet et une maison de bonne valeur à l’intérieur des murs de la ville. Aucun habitant n’est déclaré « pauvre », alors qu’il y en a dans d’autres communautés. Tous les habitants doivent un cens annuel au seigneur, en nature et/ou en espèces. Ce cens et les rentes concédées par ceux qui ont dû s’endetter sont déduits de la valeur globale du patrimoine pour aboutir à une base d’évaluation nette. La plupart des habitants se disent « taillables et exploitables à la volonté et à la merci du seigneur, ce qui les soumet à son arbitraire ; seuls 7 y échappent en étant soumis seulement dans cinq cas bien précis ( départ en croisade, seigneur armé chevalier, achat de château, mariage d’un enfant, participation au paiement d’une rançon ) . Bozas n’obtiendra un affranchissement complet de cet arbitraire seigneurial qu’en 1561, date clé pour l’amélioration de la condition juridique et matérielle des habitants.

Le territoire cultivé par ces habitants ne représente que 10% de la surface totale de la seigneurie ( très proche de celle de la commune actuelle : environ 100 hectares de terres ( mesurés en sétérées), 20 hectares de prés (mesurés en sestives) et 5 hectares de vignes (mesurés en fossoirées) . Tout le reste est en landes ou bois qui appartiennent au seigneur (Bois-Madame, Malaurier etc…), où le seigneur et les nobles ont le monopole de la chasse. Au levant, vers l’aval du ruisseau de Sauzine, l’exploitation directe par le personnel du château va jusqu’au Bas-Vivier, réserve de poissons pour le château.

Les habitations des nobles ne sont pas mentionnées. Outre le château, il y a certainement en 1464 celle dite « Salleton », qui appartenait à la famille de Bosas-Chirols. Cette demeure, démolie il y a une vingtaine d’années, était bien visible sur les cartes postales du début du 20ème siècle.

Liste des habitants de BOZAS en 1464

Un document conservé aux Archives Départementales nous permet de connaître le nom des habitants de BOZAS en 1464, hormis les nobles et les religieux . Il est très probable qu’ils soient les ancêtres par les femmes des familles qui étaient présentes à BOZAS avant la fin du 20ème siècle et l’arrivée de nouveaux résidents.

Liste des habitants ( lieux de résidence) : André PERDRIOLE ( PERDRIOLE et BOZAS) ; Jehan GAUREL ( BOZAS+BLACHIER) ; Gérenton de la PRADE ( PRADE) ; François de MALBURRET ( SERT ?) ; Pierre LOBAT ( LA CHAM) ; Raudet de CUMBE DOMENGIA ( COMBE DIMANCHE) ; Claude de CUMBE DOMENGIA( idem+ ROSSIGNOL) ; Mathieu de L’OLME ( L’HOME et LA CHAVA) ; Guillaume de SAUZET ( SAUZET+BOZAS) ; Jehan METGE ( BOZAS) ; Symond de VEYRONS ( VEYRANS). Guigon de BOSCVIEILH (BEAUVEL) ; Guillaume BOSCHET (BOZAS). Berth. ESPELHAT ( L’ESPELLIERE) ; Mathieu de VEYRONS ( VEYRAND) ; Anthoine FAURE ( BOZAS) ; Pierre de MONTMANDON ( MONTMANDON) ; Gérenton BUFFIERE ( doux CUMBAYS , LA COMBE ?) ; Gérenton GARDON ( GARDON) ; Jehan PROVENSAL ( PROVENSAL) ;Jehan DAUSO (BOZAS) ; Laurens VALLETTE ( LA VALLETTE) ; Ponchon FOARD ( BOZAS) ; Claude PAYENIER ( LA PAYENIERE) ; Claude VINIER ( LES VIGNES ?) ; Claude CHIRIAT ( LAS CHIRIAS) ;Jehan BRETON ( BRETONS) ;Pierre MASSAS ( MASSAS) ;Claude VINTENON (BOSAS) ; André CHAMBEYRION ( CHAMBERIEUX) ; Jehan MARCHAND ( JEHAN LOUT).